Souveraineté

Souveraineté

Mardi 6 décembre 2011, par André Bellon

L’article ci-dessous a, par ailleurs, été publié par Marianne2.
Voir http://www.marianne2.fr/Les-petits-arrangements-de-Sarkozy-avec-la-souverainete_a213290.html

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La période que nous traversons aura au moins eu cet avantage de recréer une ébauche de débat sur la souveraineté.

Depuis des années, le mot était limité à une définition largement péjorative, mêlant allégrement « nationalisme » et « souverainisme ». Méthode commode qui permettait d’évacuer la question. Personne évidemment ne disait officiellement vouloir changer l’article 3 de la Constitution, pourtant fondé sur ce concept pestiféré en stipulant, « que la Souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum ». Mais le silence permettait sa disparition implicite, en catimini.

Voila que soudain, sous la pression des évènements et, sans doute aussi, de l’élection présidentielle, le thème prend une ampleur inattendue.

C’est tout d’abord, en dehors de tout intérêt électoral nous dit-on, Nicolas Sarkozy qui s’indigne que le PS et les Verts proposent de supprimer le droit de veto de la France à l’ONU, passant (volontairement ?) sous silence que la chose fut proposée au Parlement européen il y a quelques années par des députés RPR/UMP.

Dans le même souffle, l’ineffable Président insista sur la nécessité de prendre plus de décisions européennes à la majorité qualifiée et non à l’unanimité, ce qui implique que la France puisse voir ses propres choix décidés par une coalition d’États membres. Les contradictions ne l’ont jamais, comme on le sait, empêché de dormir, mais gare à la schizophrénie.

Ce lundi 5 novembre, c’est son ministre de l’agriculture, Bruno Lemaire, qui insiste sur la nécessité d’une « union nationale » autour de la fameuse « règle d’or » concernant l’équilibre budgétaire. L’idée ne l’effleure pas qu’il s’agit là d’un double abandon de souveraineté : celle de la France sur son propre budget, celle des citoyens sur les affaires publiques. Mais non. Toujours plus enthousiaste lorsqu’il attaque ses adversaires que lorsqu’il prétend défendre le pays, il explique que la « règle d’or » permet de rétablir la souveraineté de la France par rapport aux marchés. Apparemment, il lui a échappé que ce sont justement les opérateurs financiers et leurs valets des agences de notation qui réclament une telle mesure. Il est surtout difficile de dire plus clairement qu’il prend les français pour des imbéciles. A moins que lui-même…

La souveraineté n’est pas un principe dangereux ou archaïque. Elle est d’ailleurs défendue avec pugnacité par les États-Unis ou la Chine qui n’hésitent pas à la protéger à coup de mesures protectionnistes enveloppées dans le drapeau national. Elle ne consiste pas en un repli frileux comme le voudrait l’extrême-droite mais, dans la tradition républicaine, à affirmer que le peuple doit maîtriser son propre destin. Son outil principal est la démocratie. Si les représentants politiques l’ignorent, sont-ils dignes de rester des représentants ?