Ne pas tomber dans le panneau

Ne pas tomber dans le panneau

Dimanche 14 novembre 2010, par Association pour une Constituante

Qui connaît Villeneuve les Maguelone ? Charmante commune de l’Hérault proche de Montpellier, cette cité est en général plus évoquée pour sa prison qui abrita José Bové que par le procès que déclenchèrent, le 5 août 2009, le citoyen Robert Hadjadj et le MRSP qu’il avait fondé, contre les décisions de ses édiles. La volonté de ceux-ci d’apposer à l’entrée du territoire communal des panneaux en occitan indiquant « Vilanova de Magalona » choquait ce citoyen féru d’histoire autant que de francophonie.
Villeneuve s’était autrefois appelée Civitas Magalonensium et notre érudit local, tout en expliquant l’histoire de son nom, protestait contre l’invention de ce patronyme occitan qui devait plus à la tendance régionaliste qu’à un passé local.
Si forte est, de nos jours, l’idée que le parler français est désuet, et si ancrée est, dans les mentalités de nos dirigeants, la pensée qu’il faut faire table rase du passé de la nation française, que personne ne prit au sérieux la plainte déposée par le David de Villeneuve les Maguelone contre le Goliath de la nouvelle modernité.
C’est dans ce calme général de la bonne conscience que tomba la nouvelle : le citoyen Hadjadj avait gagné son procès. Les juges avaient simplement considéré que, d’après le code de la route, les panneaux d’entrée des communes étaient destinés à renseigner ceux qui y passaient et non à régler des comptes entre les tenants des langues nationales et locales.
Aussitôt, les occitanistes les plus extrêmes tombèrent comme à Gravelotte pour dénoncer le sectarisme supposé du petit citoyen Hadjadj. Celui-ci répliqua que son attitude ne visait pas le parler régional, mais la volonté affirmée de le promouvoir pour détruire la langue nationale.
Robert Hadjadj est, de plus, responsable du cercle local de l’Association pour une Constituante ( www.pouruneconstituante.fr ). Les critiques tombèrent alors aussi sur cette organisation, d’autant plus qu’elle prétend permettre aux citoyens de se réapproprier la vie politique et au peuple de retrouver sa souveraineté démocratique. L’anti « populisme » se conjuguait avec le dédain vis-à-vis de la langue française, historiquement dépassée, paraît-il, par la mondialisation.
Le Président de l’Association pour une Constituante, André Bellon, ancien Président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale et député provençal, expliquait pourtant que son organisation n’avait aucune position contre les langues locales qui participaient du patrimoine national. Il ajoutait que chaque adhérent ou cercle pouvait, en la matière avoir sa propre position, comme le faisait à sa manière, le cercle de Montpellier, et que, seules, les institutions désignées par la Constituante auraient vocation à légiférer sur ces questions. En revanche, disait-il, les langues régionales ne doivent pas être le prétexte à la remise en cause de l’unité du peuple ou, pire, à sa disparition que, seul, il pourrait démocratiquement décider. Il ajoutait qu’une tentative avait été faite le 29 mai 2005 pour dissoudre le peuple français dans le traité constitutionnel européen et que la réponse avait été très clairement négative.
De son côté, Robert Hadjadj, dans son mémoire auprès du tribunal
administratif de Montpellier, expliquait que « Les parlers régionaux,
participent sûrement à la richesse de notre culture, et que chacun peut, s’il le veut, pratiquer librement la langue de sa région en France ; en revanche, faire entrer dans la Constitution les parler régionaux peut être une porte ouverte vers la ratification de la Charte européenne sur les langues régionales. Si demain cette Charte s’appliquait, elle obligerait les États qui l’ont ratifiée à donner, pour les minorités considérées, le droit à utiliser leur langue minoritaire dans leurs relations avec l’administration et l’Etat ; n’importe qui pourrait, par exemple, ester en justice, dans son travail, dans la langue de sa région
 ».
On ne s’étonnera pas que les positions soient, pour l’instant, rester
figées. Mais, au delà de son aspect a priori anecdotique et pour le moins inattendu, cette affaire a l’avantage de briser cet espèce de silence qui entoure, depuis des années, la destruction des structures républicaines. De petit pas en petit pas, de petit geste en petit geste, tout est fait pour dissoudre le peuple et la démocratie qu’il doit exercer dans l’espace européen d’une part, dans les particularismes régionaux d’autre part. On peut juger cela légitime. Encore faut-il avoir le courage de le dire et d’accepter le verdict populaire lorsque la question est enfin posée.