Si tu n'es pas sage....

Si tu n’es pas sage....

Mercredi 30 décembre 2009, par Anne-Cécile Robert

La pandémie de grippe A serait en train en régresser en France comme dans le reste de l’Occident. Tant mieux. On se rappelle cependant les prévisions alarmistes du gouvernement français et de l’Organisation mondiale de la santé qui annonçaient des millions de victimes. Il y a quelques années, la grippe aviaire, le Srars et la maladie de Kreutzfeld-Jacob devaient, elles aussi, massacrer la population de la planète. Comment se fait-il que ces prévisions se révèlent toujours erronées alors même que les campagnes sanitaires ont à peine commencé à produire leurs effets ? Le président de Médecins sans frontières, Rony Brauman, dénonce purement et simplement une manipulation des peurs. Il s’agirait ainsi d’entretenir un climat de danger permanent incitant les citoyens à se tenir tranquille. Les faits abondent, en effet, qui alimentent les peurs. Si l’on a raison d’être prudent, l’accumulation des menaces brandies par les autorités et les médias, et qui, la plupart du temps, se révèlent in fine relativement inoffensives, laisse perplexe. Intentionnelle ou pas, la construction de climat produit des effets extrêmement négatifs sur la société.
Aucune société libre ne peut vivre sous la menace permanente.
Aux peurs sanitaires se mélangent de plus en plus indistinctement les peurs politiques véhiculées par les dirigeants : on ne peut pas mettre en œuvre telle ou telle politique sinon le déficit budgétaire va s’aggraver, on ne peut pas préserver les droits sociaux parce que les entreprises vont délocaliser, on ne peut pas refuser telle ou telle mesure européenne sinon l’Europe va exploser, etc. Au total, les citoyens sont toujours le couteau sous la gorge, infantilisés (si tu n’es pas sage, tel danger va se réaliser). La logique de la peur fait croire que les menaces sont fatales, qu’elles n’ont aucun rapport avec la volonté humaine, que la destruction de l’environnement, le développement des maladies, ne sont aucunement liés aux choix économiques. Va-t-on, un jour prochain, tenter d’imposer aux citoyens l’idée que la crise financière est une catastrophe naturelle ?
On pourrait éventuellement croire à tous ces discours, s’ils ne profitaient pas toujours aux mêmes. Les doses de vaccins inutiles ont été payées à des laboratoires avec l’argent de l’Etat ; la lutte contre le déficit budgétaire ampute d’abord les budgets sociaux, etc. Et la crise financière a, in fine, profité à ceux qui l’avaient créée (les banques, les opérateurs financiers et ceux qui les soutiennent). La grande perdante de ce contrôle social permanent est la démocratie elle-même, prise en otage dans des conditions douteuses par des dirigeants qui n’ont plus aucun sens de l’intérêt général. Quant aux citoyens, petit à petit obligés de se soumettre, ils redeviennent insensiblement des sujets, ceux des intérêts dominants.